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MELAINE DALIBERT & DAVID SYLVIAN « Vermilion Hours »

(27/06/2025 – Mind Travels – Ici d’Ailleurs / L’Autre Distribution)

David Sylvian avait déjà signé les visuels voire les mixages d’albums de Melaine Dalibert dont Musique pour le lever du jour, mais l’ex-Japan permet ici au pianiste de rejoindre la prestigieuse liste de ses collaborations musicales (où figurent Robert Fripp ou Ryuichi Sakamoto entre autres). Aux pièces du compositeur désormais habitué de la collection Mind Travels qui se déploient avec patience et finesse comme leur nom l’indique (la seconde est Arabesque), le Britannique offre un subtil écrin électronique, appliquant aux procédés d’écriture rationnels voire cliniques du Rennais une transformation paradoxalement très organique voire baroque. Pour un temps de contemplation qui agit comme une cure de jouvence…

THE YOUNG GODS « Appear Disappear »

(13/06/2025 – Two Gentlemen / Bigwax)

Le plus grand groupe Suisse est de retour, et après la superbe parenthèse In C (Terry Riley) ils voulaient « quelque chose de plus brut » affirme leur leader Franz Treichler. Alors avec ses complices Bernard Trontin et Cesare Pizzi (pionnier du sampling sur les premiers albums), il n’hésite pas à faire rugir la (vraie) guitare, parce qu’il « s’agit toujours de briser la formule ». L’album est à la fois très personnel pour Franz puisqu’il a été affecté par la disparition de son épouse, mais aussi très politique (déplorant la situation à Gaza ou la guerre des drones). Après l’énergie sombre de l’éponyme premier single Appear Disappear, on plongera dans les rythmiques entêtantes de Systemized, puis on retrouvera l’aisance habituelle des Helvètes pour faire quelques belles incursions en français (Hey amour, Mes yeux de tous), jouant habilement sur les mots quelle que soit la langue (Tu en ami du temps, Blue Me Away). Fêtant leurs 40 ans de carrière avec ce disque et une tournée dans toute l’Europe, les Gods ne sont manifestement pas prêts d’être Off the Radar.

BRIEG GUERVENO « Un noz a vo »

(16/05/2025 – ZRP / Kuroneko)

Les éventuels a priori sur l’idée d’un album de folk en Breton seront vite balayés à l’écoute de ce disque, qui parachève le virage entamé par l’artiste avec son précédent album. Dans sa langue paternelle, il évoque avec pudeur la tempête qui a soufflé sur sa vie (Ar Barr Avel), l’impression d’être « passé à côté » (Hebiou Din) n’empêchant nullement l’espoir, au contraire, pourvu qu’on ne craigne plus l’embrasement de son cœur (magnifique Kalon flamm) et  les pages qui se tournent ensuite. Nourri de lectures (Jón Kalman Stefánsson, Emily Brontë), ce disque enregistré au Pays Basque est le premier du Costarmoricain à parler d’amour, débarrassé de la peur de la perte (Piv ‘vin), tourné vers la nature, conscient que nous finirons en poussière (Poultrenn), remarquable de maîtrise et de sérénité.

MAUVAIS SANG « La faune »

(09/05/2025 – Dagaanda / The Orchard)

Suite du diptyque entamé l’an dernier avec l’EP La flore dont il partage certains titres (Modèle, Nuit venin…), le second album du groupe savoyard disséminé entre Genève, Londres, Lyon et Paris continue de prendre des risques et de creuser sa belle singularité. Celle d’un chant en français pour une musique tour à tour abrasive et aérienne (comme Nouvelle ère son premier extrait), d’un propos sachant mêler l’intime et l’universel au milieu d’un monde en mutation, observant une humanité comme figée Sur la plage et qui feint d’ignorer le danger tout proche (La danse du feu). Celui aussi d’être des jeunes gens pas encore trentenaires et pourtant déjà tournés vers ceux qui suivront (et survivront ?) : hypnotique L’enfant, vertigineux Loin

VICTOR LOUIS GABRIEL « Le monstre et la maison »

(25/04/2025 – Vibrations sur le Fil / Inouïe Distribution)

Compositeur (Pomme…), réalisateur artistique (Laurent Lamarca, Eddy La Gooyatsch, Comme John…) mais aussi souvent sur la route comme musicien de scène (aux côtés d’Ycare en particulier), l’ex-Grimme a voulu donner un nouveau départ à sa vie en partant s’installer en forêt avec sa femme et leurs enfants (Tout est à refaire, J’irai danser loin des pavés…). Avant qu’on découvre le mal incurable de sa compagne, qui malgré l’espoir (Tu guériras, Sors, Tu danses encore…) a fini par l’emporter quelques semaines avant que ne sorte ce disque, pourtant très lumineux. Car c’est bien le propos : trouver la lumière même au plus profonde de l’obscurité (Le verre à moitié vide…), profiter de chaque moment puisqu’après tout l’issue ne fait aucun doute (Ce n’est rien…), savoir toujours et encore inventer un après (Quand tout tombera demain…).

JO VAGUE « Vague » ep

(18/04/2025 – SonVague)

Le jour, Julie Roué est une des rares compositrices françaises à avoir fait sa place sur les écrans (La fille de son père, Zorro, Le monde n’existe pas… – BO primée à Séries Mania). La nuit elle devient Jo Vague, chanteuse hantée par les désirs et les angoisses de notre époque. Celle qui a « quitté Brest » pour devenir ingé son après le conservatoire s’est éprise de synthés : sur une electro-pop puissante et inventive, elle pose une voix intimiste qui lui permet de se glisser dans la peau de ses personnages. Son premier EP observe d’un côté  un monde en perdition, avec la canicule de Halftrack ou la déclaration d’amour que constitue Nous de feront pas d’enfant en ces temps incertains, tandis que le second single Jane déconstruit les repères de la chanson d’amour. De l’autre côté pourtant, mieux vaut en rire comme sur Superflex dont on se prend à siffloter la ritournelle maligne, et puis laisser parler ses sens presqu’animaux sur le dancefloor avec No Disco. L’humour et la danse comme remèdes au vague à l’âme.

CLOÉ DU TRÈFLE « La lueur »

(04/04/2025 – Autoproduction)

Sa collaboration avec la performeuse Lisette Lombé (Brûler Danser) lui a valu à juste titre de nombreux éloges et un regain d’attention. Derrière son nom très « chanson » (et c’est bien de la chanson, aux textes soignés), l’artiste belge façonne aussi de vraies textures électroniques. L’organique est pourtant omniprésent (Ton souffle, Sous ta peau…), mais on cherche aussi à déchiffrer les chorégraphies invisibles qui semblent orchestrer nos vies en secret (Électrons libres, La lueur, La frontière invisible…), et l’on s’interroge avec elle sur le sens des trajectoires (Virage, Bruxelles-Lausanne, L’élan…). Avec face au chaos du monde une empathie rédemptrice et l’envie de célébrer une humanité aspirant à un monde meilleur.

MIDORI HIRANO & CoH « Sudden Fruit »

(04/04/2025 – Mind Travels – Ici d’Ailleurs / L’Autre Distribution)

Basée à Berlin, la pianiste japonaise Midori Hirano s’associe au musicien électronique russe Ivan Pavlov alias CoH, proche de la galaxie Coil, désormais installé en France après un long séjour en Suède. Toujours illustré par un somptueux visuel signé Francis Meslet, Sudden Fruit est une nouvelle pièce du passionnant puzzle que construit la collection Mind Travels depuis quelques années déjà au service des musiques de traverse, permettant ici de jeter un nouveau pont entre la frange néo-classique de son catalogue et le pan expérimental/ambient de son territoire. En ouverture, Wave to Wave incarne à merveille le subtil équilibre entre organique et digital élaboré par le duo. Jamais envahissantes, les textures sonores de CoH offrent au propos une puissance narrative surprenante, tandis que le sens mélodique d’une Midori Hirano à la large palette joue des silences comme sur Mirage Memories.  Ombres, échos, gravité, disparition, retour, fleurs, vagues… : les titres de chaque pièce évoquent sans cesse le lien intime entre évanescences et éclosions, comme chacune donne sens à l’autre, comme les basses fréquences investies par CoH soutiennent les notes aériennes de Midori Hirano…

THE YOUNG GODS « Appear Disappear » single

(27/03/2025 – Two Gentlemen / Believe)

40 ans de carrière pour le plus grand groupe suisse, qui se fit connaître en chamboulant le rock avec ses sons-de-guitare-sans-guitare, mais n’hésitant pas à empoigner ensuite la six-cordes pour n’être jamais où on l’attend, influençant jusqu’à NIN et Bowie. Avec ce nouveau single, la guitare est de retour, incisive, annonçant un nouvel album à la fois frontal, personnel et politique, occasion pour Franz Treichler, Cesare Pizzi et Bernard Trontin de repartir en tournée dans toute l’Europe à l’automne.

JÉRÔME MINIÈRE « Le sourire » single

(21/02/2025 – Autoproduction)

Entre deux albums (le prochain arrive début 2026), le franco-québécois nous envoie tout simplement une petite carte postale de Montréal en forme de chanson douce-amère comme peu savent en faire aussi bien : une invitation à garder le sourire et à le partager en cette période incertaine et chaotique, délivrée par Jérôme Minière, improbable « coach » de cette ritournelle au refrain contagieux. La délicatesse d’un sourire est aussi un acte de résistance.